Le risque, merci Jacques

22 novembre 2005

Un article de Jacques Berthomeau daté du mardi 22 novembre 2005

‘C’était sur Planète, la chaîne thématique, deux émissions avec Pierre-Gilles de Genne, un de nos Nobel. L’homme est séduisant, plein d’humour et de vitalité mais l’on sent l’intervieweur gêné – il n’apparaît pas à l’écran – la cause, on le sent si je puis m’exprimer ainsi, c’est que le cher grand homme de science tire consciencieusement sur un petit cigarillo qui n’a de cesse de s’éteindre.

Au bout d’une dizaine de minutes l’intervieweur n’y tient plus, il se lance sur le thème ‘ce n’est pas politiquement correct de s’afficher cigarillo au bec’. Notre Nobel s’y attendait et sa réponse, elle aussi politiquement incorrecte, est à méditer par ceux qui veillent avec le soin des comptables sur notre santé.

Pierre-Gilles de Genne raconte que, jeune chercheur, dans le laboratoire où il se trouve, un de ses patrons parti à la retraite, travaillait pour la Défense Nationale et, un jour, une femme de ménage se présente en tenant dans ses bras un obus amorcé qu’elle a découvert dans le fond d’un placard. La réaction des présents est intéressante. La quasi-totalité prend la poudre d’escampette. Reste de Genne, la femme de ménage et un ou deux collègues qui assument le risque que l’engin leur pète à la gueule.

Assumer le risque, ne veut pas dire faire n’importe quoi, en l’occurrence se soumettre à la tabagie ou pour nous à l’ivrognerie, mais faire des choix de vie, de sa vie et, n’en déplaise aux grands professeurs ou à ceux qui se sont autoproclamé défenseurs de notre santé, celle-ci ne leur appartient pas et qu’une politique de Santé Publique fondée sur des analyses tronquées ou des actions de pure communication ne peut qu’être inefficace. S’attaquer aux causes profondes, protéger les populations à risque, ne pas instrumentaliser les produits mais voir le monde tel qu’il est permettrait sans doute de progresser sans pour autant mettre au ban de la société des hommes et des femmes qui, même si le mot est désuet, par leur labeur font que notre pays tient encore vivant son territoire.’